Un conflit peut en cacher un autre… Lundi 27 janvier 2020, la grève à Radio France entrait dans son 56ème jour. Pourtant, la Direction se félicitait d’un « vrai pas en avant » : les négociations en cours avec 4 syndicats se poursuivent, en vue d’un « accord négocié sereinement ». Comment expliquer ce ton positif ?
Bien encadrés, les conflits les plus longs et les plus durs peuvent déboucher sur un accord.
Les conflits en entreprises sont une source de valeur souvent sous-estimée. Étymologiquement, le mot « conflit » vient de « conflictus » et signifie « action d’être aux prises, combattre ». Si la violence sous toutes ses formes – verbale comme physique – est bien sûr à bannir en entreprise comme ailleurs, un conflit encadré est source de richesses.
Quelles sont les alternatives au conflit ?
Face à un danger, l’être humain peut réagir spontanément de 3 façons différentes : la fuite, la paralysie ou l’attaque – que les anglo-saxons nomment les 3 F : Flight, Freeze, Fight.
Quelles sont les impacts de ces 3 options ?
La fuite se traduit dans l’entreprise par l’évitement, le désengagement, voire l’autosabotage, qui peut conduire dans le pire des cas à des risques psycho-sociaux, au burn-out, voire au suicide.
La paralysie prend le plus souvent en entreprise la forme de la soumission à la norme, au détriment de l’engagement et de l’évolution de l’organisation, de son adaptation aux changements de l’environnement.
Alors, qu’en est-il de l’attaque ? A première vue, cette option n’apporte pas beaucoup plus de bénéfices : elle conduit inévitablement les parties en conflit à surenchérir, pour prendre le dessus, dans une escalade dont une seule partie au mieux pourra sortir gagnante, par exclusion de l’autre – un jeu à somme nulle pour l’entreprise, sans compter les impacts sur le climat de l’entreprise.
Ainsi, aucune de ces 3 options ne semble générer de valeur pour l’entreprise : quand la fuite génère le désengagement, la paralysie engendre le conformisme, et le conflit génère des tensions.
Le conflit, vu comme confrontation de points de vue divergents, à condition qu’il soit encadré, est source d’innovation et d’adaptation aux changements auxquels sont de plus en plus soumis nos organisations.
Encadré, le conflit peut prend la forme de la négociation ou de la médiation. Dans les 2 cas, la condition de succès est une posture d’écoute réciproque de la part des parties prenantes. La négociation est la forme la plus directe ; la médiation, qui se caractérise par l’intervention d’un tiers facilitateur, peut s’avérer nécessaire quand les relations ont été altérés par un conflit trop dur ou trop long.
Quelles sont les conditions pour générer de la valeur à partir de situations conflictuelles ?
3 conditions sont autant de prérequis pour convertir les conflits en levier de création de valeur pour l’entreprise :
- Favoriser la prise de recul des parties prenantes, pour qu’elles ne cèdent pas trop vite à l’automatisme auquel notre corps est soumis face aux dangers – les 3F – et qu’elles s’ouvrent le plus tôt possible à l’option de la négociation ;
- Favoriser l’expression des points de vue divergents; solliciter régulièrement l’avis des collaborateurs sur différentes options, inciter chacun à s’exprimer ; des personnes les plus discrètes et des points de vue les plus décalés peuvent émerger les solutions les plus innovantes ;
- Développer une posture de curiosité et d’ouverture au point de vue de l’autre, par exemple à travers des projets transverses et pluri-disciplinaires.
Ainsi, contrairement aux idées reçues, le conflit peut être source de fabuleuses richesses pour l’entreprise, à condition qu’il s’exprime dans un cadre positif et sécurisant, pour favoriser l’expression de points de vue divergents, sources d’innovation.
Olivier ENDELIN